THIOBACTÉRIALES

THIOBACTÉRIALES
THIOBACTÉRIALES

Les Thiobactériales forment un groupe important parmi les organismes qui sont responsables du cycle biologique du soufre.

Leur position dans la systématique et leur classification posent des problèmes très difficiles, si bien que les auteurs ne sont pas unanimes à admettre leur existence en tant que classe ou ordre. La plupart, possédant un pigment de type chlorophyllien, tirent leur énergie de la lumière (phototrophes) et vivent essentiellement dans les eaux. On ne saurait, dans un article qui leur est consacré, manquer d’évoquer aussi les Thiobacillus , dont la physiologie et le rôle dans le cycle du soufre sont voisins et, en tout cas, synergiques; mais les Thiobacillus oxydent le soufre jusqu’au stade S42-, alors que les Thiobactériales proprement dites oxydent H2S jusqu’au soufre métalloïdique. Enfin, il est indispensable de rappeler que d’autres bactéries de ce cycle (Desulfovibrio , par exemple) réduisent S042- en H2S.

Caractères et classification

Les Thiobactériales constituent un groupe de bactéries caractérisées physiologiquement par une action oxydante sur les composés minéraux réduits du soufre (essentiellement H2S), avec accumulation dans leurs cellules de granules de soufre élémentaire. Grâce à la présence de bactériochlorophylle, et éventuellement d’autres pigments, ces bactéries sont phototrophes obligatoires ou, pour certaines, facultatives (auxotrophes). Elles sont toutes anaérobies strictes. Cependant, les caractères morphologiques des genres sont tellement différents et certaines particularités physiologiques sont si accentuées que la classification systématique est extrêmement difficile et que les auteurs du Bergey’s Manual of Determinative Bacteriology refusent ce groupement. Paradoxalement, les classifications américaine (Bergey) et française (Prévot) y font entrer une famille (Athiorhodaceae ) qui n’a rien à voir avec le cycle du soufre. Plus paradoxalement encore, Bergey classe les bactéries vertes (Chloro...) dans les bactéries pourpres (Rhodo...). Dans une si totale confusion, on peut seulement résumer dans un tableau les trois classifications actuellement proposées.

Bioénergétique

Toutes ces bactéries, sauf les Beggiatoales, utilisent l’énergie lumineuse grâce à deux types de pigments. Cette photosynthèse bactérienne ne libère pas d’oxygène comme chez les plantes [cf. PHOTOSYNTHÈSE], mais la réaction exige un donateur exogène d’électrons (DH2), oxydé au cours du processus:

DH2 est ici l’hydrogène moléculaire, ou un composé minéral du soufre tel que H2S, S23:

dans cette dernière réaction, la variation d’énergie libre F 0 est égale à + 15 kcal. Cependant, des substances organiques (lactate, acétate, pyruvate, éthanol) peuvent également servir de donateurs pour certaines espèces; ainsi, dans le cas de l’acétate:

Les pigments sont des bactériochlorophylles et des caroténoïdes ; la couleur des bactéries est fonction de leurs proportions relatives. On connaît quatre bactériochlorophylles désignées par les lettres a, b, c, d , dont les longueurs d’onde de maximum d’absorption se situent sur deux pics: 358 à 432 nm pour le premier, et 651 à 771 nm pour le second, chacune de ces quatre substances ayant ses deux optima propres. Les caroténoïdes , dont trente environ ont été isolés, contribuent à la photosynthèse en captant l’énergie lumineuse entre les deux pics d’absorption de bactériochlorophylles et en la transférant à ces dernières; l’efficacité du transfert est de 50 p. 100. De plus, ils protègent les cellules contre l’action toxique des photo-oxydations.

Certaines espèces ont besoin de facteurs de croissance (auxotrophes). Enfin, les Beggiatoa , non chlorophylliennes, sont des chimiotrophes.

Morphologie et physiologie

Dans l’immensité de ce groupe ne seront sommairement décrits ici que quelques espèces ou genres particulièrement bien individualisés et étudiés.

Le genre Chromatium (Thiorhodaceae ) est constitué par des cellules ovoïdes, isolées, mobiles par cils polaires (fig. 1). Il contient de la bactériochlorophylle a et des caroténoïdes, d’où sa couleur pourpre. Les cellules renferment des granules de soufre. Les Chromatium sont tous anaérobies et phototrophes stricts. Ils se développent en utilisant comme donateurs d’électrons des composés minéraux du soufre ou des substances organiques. Douze espèces ont été décrites, dont certaines sont auxotrophes.

Chez Ectothiorhodospira (Thiorhodaceae ), le soufre élémentaire se dépose hors de la cellule (fig. 2).

Le genre Thiospirillum (Thiorhodaceae ) présente les mêmes caractères que Chromatium , mais la bactérie est spiralée. Cinq espèces ont été individualisées.

Les bactéries formant le genre Chlorobium (Chlorobacteriaceae ) sont immobiles, sphériques, ou parfois allongées, spiralées ou en chaînes, Gram-négatives. Elles possèdent souvent une capsule visqueuse. Elles contiennent de la bactériochlorophylle c , et parfois d , et sont de couleur verte. Au point de vue physiologique, ce sont des anaérobies et phototrophes strictes. Elles n’utilisent comme donateurs d’électrons que les composés minéraux, dont l’oxydation libère du soufre élémentaire qui se dépose en dehors de la cellule. Deux espèces ont été décrites.

Les cellules piriformes de Rhodomicrobium (Hyphomicrobiales) se multiplient par bourgeonnement, les cellules filles restant attachées au filament qui les relie à la cellule mère. Rhodomicrobium est mobile par cils polaires. Il contient de la bactériochlorophylle a et des caroténoïdes qui colorent la culture en rouge. Anaérobie et phototrophe strict, il utilise comme donateurs exogènes d’électrons des composés minéraux ou organiques.

Cellules incolores, disposées en chaînes formant des longs filaments (trichomes) non ramifiés et en général cloisonnés (fig. 3), les Beggiatoa (Beggiatoales) se déplacent par glissement sur les substrats solides. Ils se reproduisent par divisions transverses. Dépourvus de pigments, ils ne sont pas photosynthétiques; ce sont des anaérobies stricts. Ils oxydent l’hydrogène sulfuré en soufre élémentaire qui s’accumule dans les cellules sous forme de granules. Lorsque le soufre exogène est épuisé, ces granules sont secondairement oxydés en sulfate:

Au point de vue de leur phylogénie, on tend à les rapprocher des algues filamenteuses; celles-ci auraient perdu leurs pigments.

Les Thiobacillus (espèces types T. thiooxidans et T. thioparus ) ne font pas partie, stricto sensu , des Thiobactériales, mais ne peuvent être ici passés sous silence. Il s’agit de très petits bâtonnets de 1,5 à 2 猪m de long sur 0,5 de large, mobiles par cils polaires, Gram-négatifs. Chimiolithotrophes aérobies, ils tirent leur énergie de l’oxydation de H2S, S232- ou S0 :

F 0 étant respectivement égal à 漣 137,6, à 漣 253,6 et à 漣 186,7 kcal/mole.

Dans tous les cas, le produit final du métabolisme est l’acide sulfurique libre, dont l’accumulation abaisse jusqu’à 1 le pH du milieu. La tolérance à cette acidification varie d’une espèce à l’autre.

Écologie

Les bactéries sulfureuses photosynthétiques , vertes ou pourpres, se trouvent dans les eaux contenant H2S et exposées à la lumière. Elles se développent parfois au-dessous d’une couche superficielle d’algues vertes ou bleues, car le décalage de leur longueur d’onde optimale d’absorption, par rapport à ces dernières, permet encore leur croissance. Leurs biotopes électifs sont donc les sources thermales sulfureuses et les eaux proches de vases noires profondes où H2S provient soit de la réduction des sulfates par Desulfovibrio , soit de la minéralisation anaérobie des acides aminés soufrés de la matière organique.

Les Beggiatoa , non photosynthétiques, se développent dans les eaux douces ou salées, riches en H2S et en matière organique.

Quant aux Thiobacillus , chimiotrophes aérobies, ils sont ubiquitaires; on les rencontre dans les sols (en particulier ceux qui sont traités par le soufre comme anticryptogamique), les eaux (surtout celles de drainage dans les mines de minerais pyriteux) et l’atmosphère, où ils viennent contaminer la surface des pierres des monuments recouverts d’une fine pellicule plus dure que le calcaire originel et appelée calcin, riche en soufre. Ce sont de redoutables agents de corrosion par la formation d’acide sulfurique; de même, ils abaissent dangereusement le pH des sols (les sols de vignobles traités par la «bouillie sulfocuprique»).

Encyclopédie Universelle. 2012.

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